Marie Leriche, la lumière d’Essaouira
Portraits d’Essaouira : Marie Leriche
Le Portrait :
C’est tout en douceur que nous rencontrons Marie Leriche, quelques instants avant un concert à l’Institut Français d’Essaouira. Elle est à la fin de son exposition « Cercle », que l’on pouvait apprécier entre décembre 2016 et janvier 2017, dans la salle d’exposition de l’Institut.
Ce qui marque en premier chez Marie, c’est ce sourire timide perpétuellement accroché à son visage. Une douceur perceptible qui révèle un parcours de vie consacré à la recherche de la beauté. Non pas les canons décrits par les magazines, mais LE beau, celui de la vie, de l’art, des rencontres et des paysages.
Marie Leriche est une véritable artiste. Bercée dans son enfance par une grand-mère brodeuse émérite et un père peintre graveur, elle ne se voyait pas faire autre chose que du dessin. C’est donc tout naturellement qu’elle se lance dans des études de stylisme à Paris. Après avoir fait ses armes auprès de Kazuko Yonéda, développé sa propre ligne de vêtements, et s’être perfectionnée aux Arts Graphiques, elle quitte la capitale pour rejoindre le Sud de la France. Là, elle se partage entre l’entreprise qu’elle créé avec son ex-mari, ses enfants, et la création de pièces abstraites au savoir-faire traditionnel, entre Orient et Occident, faites de stuc vénitien.
Elle expose ainsi dans différentes galeries du Sud de la France, au Salon des Indépendants, dans quelques lieux parisiens avant de s’envoler pour Shanghai où elle présente son travail lors de l’Exposition Universelle de 2010.
Les mots la transcendent autant que la recherche plastique. Marie se lance donc dans la création de Haïku, ces petits poèmes japonais dans lesquels elle exprime ses émotions. Un voyage au Japon lui ouvre les portes d’une connaissance qui bouleverse son travail et sa perception du monde. Riche de cette expérience, elle créé de nouvelles œuvres encore plus inspirées.
Marie déménage à Essaouira en 2014, pour sa météo clémente, la gentillesse des habitants et sa lumière constante.
A Ghazoua, elle découvre la culture berbère, qui la fascine. Un véritable choc esthétique qu’elle retranscrit en vidéo – notamment présentée lors des premières « Nuits Photographiques d’Essaouira* » – et dans les œuvres de son exposition « Cercle ».
Ceux qui ont pu apprécier le travail de Marie à l’Institut Français ont très certainement été captivés par cette immense pièce principale, véritable mandala apaisant, emportant aussi bien l’artiste lors de sa création, que les spectateurs qui l’apprécient, dans un univers de douceur et d’harmonie.
Lors de cette exposition, Marie nous présentait également des tamis traditionnels du Maroc, sur lesquels elle a eu la patience de broder des petites pièces en bois de thuya de récupération. Un hommage à sa grand-mère qu’elle voyait broder étant petite. Une invitation à la découverte de la beauté infime pour les chanceux qui ont pu les admirer.
Lors de notre rencontre, Marie nous explique qu’elle a créé son installation comme un chemin. Partant d’oeuvres plus sombres parlant de la guerre – qui nous prive de savoir-faires traditionnels et annihile la beauté de l’Humanité – les tamis nous emmènent en douceur vers cette fresque immense, toute en rondeur. Le chemin de l’Homme allant de l’horreur vers la lumière, qui est si chère à notre artiste.
L’interview :
→ Pouvez vous vous présenter en quelques mots ?
Je suis une artiste visuelle, plasticienne. Je me destinais aux métiers de la mode c’est ainsi que j’ai fait ma formation de styliste à Paris au Cours Berçot. En parallèle, j’ai beaucoup fréquenté les ateliers de dessins et de modelage de la rue Daguerre.
Ensuite, il y a eu une longue période dans le Sud de la France où nous avons monté, mon ex mari et moi, une entreprise de finitions murales haut de gamme : « Le comptoir de la Chaux ». Pendant cette période, je me suis appropriée ces techniques anciennes que j’ai utilisées sur panneaux de bois, en créant des pièces uniques qui furent exposées principalement dans le Sud de la France. En parallèle, je me suis consacrée à mes enfants, qui on eu la chance de grandir entre les îles de Porqueroles et la Villa Noailles, lieu que nous avons fréquenté assidûment.
Je suis fascinée par la lumière, c’est une recherche obsessionnelle. Je la cherche partout et en tout. C’est pourquoi, j’ai posé mes valises à Essaouira en 2014. Depuis, je tente de la traduire sur mes bâches et à travers mon objectif.
Je suis maman de deux grands enfants, créatifs tous les deux. Alizée est musicienne compositrice. Depuis 2016, je lui ai donné carte blanche pour réaliser les bandes sons de mes projets audiovisuels. C’est une belle collaboration, une expérience au delà de la relation mère/fille.
Mon fils Keyvan termine cette année son cursus à l’ESMA Montpellier, en section cinéma d’animation 3D.
Ils vivent tous les deux en France. Je suis fière d’eux.
→ Dans les grandes lignes, quel est votre parcours professionnel ?
J’ai travaillé quelques temps comme styliste à Paris, puis dans le Sud avec mon mari pour les techniques murales. J’ai fait le choix de m’occuper de mes enfants pendant leur petite enfance. Maintenant je me consacre uniquement à mes créations et aux consultations Feng Shui, une autre de mes passions.
→ Qu’est ce qui vous a donné envie d’exercer votre métier ?
Je suis née dans une famille de créatifs : un père peintre graveur, une grand mère brodeuse de haut niveau. On parlait beaucoup d’Art. Enfant, je ne m’imaginais pas faire autre chose que dessiner, peindre ou coudre. C’était naturel pour moi, c’était une évidence. Quand je suis dans mon atelier, je suis à ma place.
→ Quelles sont les 3 étapes, ou moments les plus importants ou les plus marquants, dans votre carrière/vie personnelle ?
1- Mon passage au Studio Berçot, où j’ai reçu l’enseignement du stylisme et de l’esprit de la mode, sans formatage, dans un cadre d’ouverture et de recherche propre à cette école, grâce à sa principale protagoniste, la géniale Marie Rucky.
2- La découverte de l’Asie, et plus spécialement le Japon. Aussi bien physiquement qu’intellectuellement, et principalement son système philosophique et de spiritualité, le bouddhisme. Découvrir que le vide est aussi important que le plein et qu’il existe. Découvrir, que le silence est matière, vibrations, que tout est interconnecté et relié à l’univers. Ces découvertes ont révolutionné ma perception du monde, de la vie en général et ont contribué à enrichir mon esprit de recherche et ma créativité .
3- Dernièrement,comme je l’ai dit précédemment, la rencontre avec la nature et la culture Berbère à Ghazoua. La forêt d’arganiers me fascine ! Tout cela, a provoqué en moi un véritable choc esthétique que j’ai tenté de traduire à travers une vidéo : « le fils du bled » et une exposition : « Cercle ». Ce travail de deux ans, a été exposé à l’Institut Français d’Essaouira en décembre 2016 et janvier 2017. En parallèle j’ai été sélectionnée à la première « Nuit Photographique d’Essaouira », avec une nouvelle recherche visuelle sur la lumière.
→ Depuis combien de temps vivez-vous à Essaouira et quelle a été votre motivation pour venir ?
Je venais régulièrement au Maroc depuis 2008, durant les vacances scolaires, pour le surf. Quand nous avons décidé de venir vivre à l’étranger, ce fut une évidence de venir au Maroc, pour sa qualité de vie, la beauté des lieux, la gentillesse de la population en général et bien-sûr pour les prix attractifs de l’immobilier ! J’ai choisi Essaouira pour la qualité et la quantité des événements culturels. Pour des créatifs c’est essentiel. Ensuite, je suis venue également pour le climat en hiver, qui me rappelait un peu la Bretagne de mon enfance.
→ Quels sont vos meilleurs souvenirs à Essaouira ou liés à Essaouira ?
Une soirée sous les étoiles, sur les terrasses du Taros pendant le festival Gnawa. Dernièrement, la soirée de projection des « nuits photographiques d’Essaouira » sous les remparts et sans vent. Tous les couchés de soleil depuis 2014.
→ Quel est votre « lieu » préféré à Essaouira ?
Dans le désordre :
→ Incontournable, prendre un thé chez Driss, proche de la place Moulay Hassan. C’est le plus ancien salon de thé de la médina. La décoration est unique, les murs sont recouvert de tableaux et de photos du sol au plafond.
→ Pour une envie de jus de fruits, de légumes, de vitamines, de sandwichs saints et végans, je conseille d’aller chez YOO sur la place aux grains. En plus de la qualité des produits et du faible coût des consommations, vous serez très bien accueilli par Francesca et son mari. C’est l’endroit tendance de la Médina et vraiment healthy.
→ L’Atelier des Arts Empreinte dans la médina. Vous y trouverez, entre autres, des aquarelles et des petites pièces en bois originales à des prix raisonnables. Vous pouvez aussi y faire faire toutes sortes d’encadrements.
→ Dar Souiri, lieu culturel incontournable et très beau que l’on ne présente plus.
→ Enfin le musée des Arts traditionnels, et pour finir, faites un tour à la galerie de l’Institut Français qui se situe au premier étage. Vous y trouverez des expositions contemporaines de grande qualité.
→ Que conseillez vous à quelqu’un qui vient visiter la ville d’Essaouira ?
Perdez vous un peu dans la médina en sortant des axes touristiques principaux. Prenez le temps, vous êtes en vacances. Ici, vous passez obligatoirement dans un autre espace temps donc, ralentissez le pas, souriez et soyez généreux.
→ Un message à faire passer à tous ceux qui vont vous lire ?
Soyez patients, au Maroc on a tout le temps. Inspirez et expirez.
Informations et Contacts :
Marie Leriche
Tel : +212 604 520 369
Email : pascale.marie.leriche@gmail.com
* Découvrez le film présenté par Marie Leriche lors des Nuits Photographique d’Essaouira sur Viméo.
Emeline, pour Vivre Essaouira, le 16 février 2017